Les experts-comptables insistent pour que les dirigeants d’entreprise soient indemnisés

15.01.2021

Gestion d'entreprise

L'Ordre des experts-comptables souhaite que les dirigeants puissent bénéficier d’une indemnité partielle de façon complémentaire au fonds de solidarité de leur entreprise. Une idée qui soulève des questions pour les TNS (travailleurs non salariés) notamment par rapport au dispositif d’allocation des travailleurs indépendants créé en 2019.

Pour Lionel Canesi, les dirigeants d'entreprise font partie des oubliés de la crise. "Aujourd’hui le chômeur a son chômage, le salarié a son activité partielle mais le dirigeant d’entreprise n’a rien, a résumé hier le nouveau président du Conseil supérieur de l’ordre des experts-comptables (CSOEC). C’est pour cette raison qu’il a insisté, lors d’une conférence de presse, sur Icône PDFsa proposition — qui n’est pas nouvelle, a-t-il rappelé — de faire bénéficier le dirigeant d’une «indemnité partielle» pour couvrir sa perte de rémunération. Une aide qui serait complémentaire au fonds de solidarité aux entreprises car ce dernier sert, selon lui, à payer autre chose : les frais généraux de l’entité. Selon nous, elle vise au moins les dirigeants non salariés dans la mesure où les cadres dirigeants salariés sont éligibles à l'activité partielle en cas de fermeture temporaire de leur établissement ou partie d'établissement (voir l’ordonnance modifiée 2020-346 du 27 mars 2020).

Indemnité minimum et plafonnée

Comment serait calculée cette indemnité versée au dirigeant d’entreprise ? Le président du CSOEC a livré quelques pistes de réflexion. "Il y a des gérants par exemple de SARL qui n’ont pas de salaire mais qui prennent un revenu mensuel, a-t-il illustré. On a la déclaration d’impôt sur le revenu des années précédentes, on a les bilans des sociétés. Donc s’il prend 2000 euros par mois, on lui donne une indemnité de 2000 euros. On pourrait mettre un minimum aussi par exemple au Smic pendant que la crise dure. Il faut aussi bien évidemment plafonner cette indemnité. On pourrait dire qu'elle est limitée à 3000 ou 4000 euros", a détaillé Lionel Canesi.

L’indépendance des TNS face à la crise

Cette proposition de faire bénéficier les dirigeants TNS de l’indemnité partielle soulève, selon nous, plusieurs questions. Parmi elles, celle de leur indépendance. Contrairement aux salariés, les TNS ne sont théoriquement pas exposés à une perte involontaire d’activité. Ce sujet avait d’ailleurs alimenté le débat lors de la création de l’allocation pour les travailleurs indépendants, une idée promue par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle. Finalement, seuls les TNS en liquidation judiciaire ou en redressement judiciaire peuvent bénéficier de cette sorte de chômage. Mais la crise actuelle place les TNS dans un contexte potentiellement différent, celui d'une forte dépendance à l'environnement économique. Faut-il attendre qu’un restaurant soit placé en redressement ou en liquidation judiciaires pour indemniser son dirigeant non salarié ?

L'allocation des travailleurs indépendants est actuellement faible

Une autre question porte sur le calcul de l’indemnité proposée par Lionel Canesi. Une difficulté se manifeste sur le décalage dans le temps entre le versement des revenus au dirigeant TNS et la déclaration fiscale correspondante de la personne physique bénéficiaire. Un sujet d’autant plus délicat que les revenus des TNS peuvent parfois beaucoup fluctuer d’une année sur l’autre. Un autre problème pourrait se poser par rapport à la récente allocation des travailleurs indépendants. En effet, le montant de cette dernière ne s’élève qu’à environ 800 euros par mois, ce qui est faible. Bref, la crise actuelle bouscule chaque jour un peu plus les dispositifs habituels.

 

50 propositions du CSOEC pour relancer l'économie
L'indemnité partielle au dirigeant fait partie de Icône PDF50 propositions présentées hier par le CSOEC pour relancer l'économie. Parmi elles figurent celle 1) de maintenir un seul taux de prise en charge de l'activité partielle, à hauteur de 70 %, pour toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d'activité, jusqu'au 31 décembre 2021 ; 2) de proroger le fonds de solidarité aux entreprises jusqu'à fin 2021 et l'adapter pour permettre de couvrir une partie des charges fixes ; 3) d'isoler, dans les comptes, la dette Covid afin d'identifier les entreprises viables. Il est également souhaité que la (provision pour) dépréciation du "fonds de commerce" soit déductible en 2021. Rappelons que fin 2018, la valeur nette comptable du fonds commercial s'élevait à 241 milliards d'euros dans les comptes des entreprises françaises.

 

Ludovic Arbelet

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