Application de la loi Pacte : où en est-on ?

Application de la loi Pacte : où en est-on ?

16.09.2019

Gestion d'entreprise

37% des mesures de la loi Pacte sont entrées en vigueur. L'ensemble des textes d'application seront publiées d'ici le 22 novembre, assure le gouvernement. Cependant, certains dispositifs prendront plus de temps à mettre en place, tel le guichet unique de création d'entreprise.

"Nous visons 100% de décrets de la loi Pacte publiés d'ici le 22 novembre". Bruno Le Maire affiche un objectif ambitieux pour les six mois du texte paru au Journal officiel le 23 mai 2019. Le ministre de l'économie et des finances a fait un point d'étape le 12 septembre dernier à Bercy. A ce jour, 50 mesures sur 136 sont entrées en vigueur (37%). Parmi elles, la réforme des seuils d'audit légal. Le décret relevant les niveaux de désignation obligatoire des commissaires aux comptes (Cac) est sorti dans la foulée de la promulgation de la loi Pacte, suivi de près par la norme d'exercice professionnel fixant - via un arrêté - les modalités de la mission de certification des comptes sur trois exercices, une des mesures d'accompagnement du relèvement des seuils.

A noter que plusieurs dispositions touchant la profession comptable n'avaient pas besoin de texte d'application. C'est notamment le cas des honoraires complémentaires de succès de l'expert-comptable, de l'élargissement du périmètre d'activité du commissaire aux comptes et du mandat implicite de l'expert-comptable. 

3 millions de salariés couverts par un accord d'intéressement d'ici 2020

D'autres mesures de la loi Pacte sont d'ores et déjà entrées en vigueur. Depuis le 1er janvier 2019, le forfait social est supprimé sur les sommes versées au titre de l'intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés, ainsi que sur l'ensemble des versements d'épargne salariale (intéressement, participation et abondement de l'employeur sur un plan d'épargne salariale) pour les entreprises de moins de 50 salariés. "Vous pouvez déjà signer des accords d'intéressement dans les entreprises de moins de 250 salariés sans payer de taxe, a rappelé Agnès Pannier-Runacher jeudi dernier. Vous pouvez déjà prévoir le versement de la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés sans payer le forfait social. Vous pouvez le faire en 2019".

Et la secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances de poursuivre : "Notre objectif c'est de doubler le nombre d'accords d'intéressement dans les PME-TPE parce que c'est une façon de partager la valeur (...) et d'associer les salariés à la bonne marche de l'entreprise". Le gouvernement souhaite ainsi atteindre 3 millions de salariés couverts par un accord d'intéressement en 2020, contre 1,2 million aujourd'hui. Des accords d'intéressement qui pourraient être signés uniquement pour un an (au lieu de trois ans) l'année prochaine, indique Bruno Le Maire, reprenant l'annonce du Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 12 juin 2019. C'est une manière de "mettre le pied à l'étrier de tous les patrons de petites entreprises qui n'ont jamais signé l'accord d'intéressement, qui pourraient être inquiets. (...) Ils peuvent s'engager pour une année uniquement pour voir si l'accord d'intéressement correspond bien à leurs attentes", déclare le ministre de l'économie et des finances. 

Les branches professionnelles doivent également prendre leurs responsabilités, prévient Thibault Lanxade. "Aujourd'hui, l'UMIH [union des métiers et des industries de l'hôtellerie], la FNTR [fédération nationale des transports routiers], la FNTV [fédération nationale des transports de voyageurs], la fédération des services à la personne, ont décidé de lancer des négociations avec des partenaires pour pouvoir définir des accords types", indique celui qui a été nommé par le gouvernement "ambassadeur à l'intéressement et la participation".

Raison d'être en marche

Autre dispositif effectif : la possibilité d'inscrire dans les statuts de l'entreprise une "raison d'être" et d'avoir la qualité de "société à mission". Il s'agit pour l'entreprise de se donner un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux à poursuivre dans le cadre de son activité (en plus de son objectif de réaliser des profits). Des entreprises, telle la MAIF, sont d'ores et déjà devenues des sociétés à mission. L'inscription dans les statuts est "indélébile", "irréversible", c'est un "engagement public [qui] nous oblige", explique Pascal Demurger, son directeur général. C'est aussi "un sujet de communication" par rapport à la concurrence.

Cette qualité d'entreprise à mission doit être distinguée d'une approche RSE (responsabilité sociétale des entreprises) traditionnelle, selon Pascal Demurger. La RSE est "à côté de l'activité de l'entreprise (...) à travers de fondations, (...) de mécénat (...)". Avec l'entreprise à mission, c'est une inscription de l'engagement dans chacune des activités de l'entreprise, explique le DG de la MAIF. L'action est au coeur même de l'activité de l'entreprise, souligne-t-il. Bercy devrait dévoiler "d'ici quelques semaines" plusieurs indicateurs dont le nombre d'entreprises à mission et le nombre d'entreprises ayant intégré une raison d'être dans leurs statuts. Et le gouvernement mise sur ce nouveau modèle. "Je (...) demande que toutes les entreprises (...) où l'Etat est actionnaire se dotent d'une raison d'être en 2020", a annoncé Bruno Le Maire jeudi.

Mise en place progressive du guichet unique de création d'entreprise

Cependant, certaines mesures "prendront plus de temps de manière opérationnelle", prévient Agnès Pannier-Runacher. Ce sera notamment le cas pour la mise en place d'un fichier unique de création d'entreprise "qui soit partagé par l'ensemble des institutions qui contribuent à la création d'entreprise ou qui l'accompagnent, les chambres de métiers et d'artisanat, les chambres de commerce et d'industrie". Une plateforme en ligne unique va remplacer les six réseaux de centres de formalités des entreprises et sera l'interface unique pour les formalités de création des entreprises, quelles que soient leur activité et leur forme juridique.

"Ce projet, on va prendre le temps de le mettre en place pour s'assurer que l'accompagnement des entreprises à la création soit toujours présent et que l'efficacité de l'outil soit avérée", indique la secrétaire d'Etat. Une mise en place progressive à horizon 2021, indique le dossier de presse de Bercy. "Une transition progressive vers une plateforme unique sera assurée pour permettre aux 6 réseaux gestionnaires de ces centres de formalités de s'adapter. Ainsi, de 2021 à 2023, le guichet unique pourra coexister avec les réseaux actuels".

Céline Chapuis

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