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La réforme du commissariat aux comptes est définitivement adoptée

Comme prévu, le Sénat a adopté hier en séance publique la réforme du commissariat aux comptes
Le Sénat a accepté hier le principe du relèvement des seuils de certification légale des comptes des sociétés. Il a toutefois manifesté quelques désaccords avec l’Assemblée nationale notamment en repoussant la date d'entrée en vigueur de la réforme et en étendant potentiellement de façon considérable le périmètre des filiales devant faire auditer leurs comptes.

Il n’y a pas eu de surprise hier au Sénat. La réforme du commissariat aux comptes souhaitée par le gouvernement, que l’Assemblée nationale a adoptée, a été enterinée en séance publique par la chambre haute — cette dernière doit toutefois encore procéder le 12 février au vote solennel de l'ensemble du texte, c'est à dire du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises. Les amendements des opposants ont tous été stoppés, soit par rejet, soit par retrait. Concrètement, cela revient à dire que les sociétés commerciales seront à terme (sauf cas particuliers) tenues de désigner un commissaire aux comptes lorsqu’elles dépassent deux des trois seuils suivants qui doivent être fixés par décret : 8 millions d’euros de chiffre d’affaires, 4 millions d’euros de bilan et 50 salariés.

Divergence sur la date d'entrée en vigueur

Si cette mesure phare a été adoptée, certaines dispositions font toutefois l'objet d'une divergence de vue entre les deux assemblées parlementaires. Il en est ainsi de la date d'entrée en vigueur. Le Sénat souhaite ainsi reporter la réforme au 1er janvier 2021 — tout en laissant les mandats en cours se poursuivre jusqu'à leur terme d'origine. Dans le projet de loi d'origine adopté par l'Assemblée nationale, il était question d'un démarrage au plus tard le 1er janvier 2019. Depuis, le gouvernement a lâché du lest. Il est prêt à reporter à l'exercice 2020 le relèvement effectif des seuils (pour les entreprises dont l'exercice comptable coincide avec l'année civile) avec toutefois un mécanisme particulier pour certaines entreprises dont le mandat du commissaire aux comptes s'est achevé au 31 décembre 2018.

Divergence sur le périmètre des filiales

Les groupes de sociétés font l'objet également d'un différent parlementaire. Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit de créer deux nouvelles situations déclenchant l'audit légal de leurs comptes. Premièrement, il impose aux entités à la tête d'un groupe de faire certifier leurs comptes dès lors que l'ensemble dépasse certains seuils cumulés, c'est à dire, selon l'exposé des motifs du projet de loi, 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, 4 millions d'euros de bilan et 50 salariés. Deuxièmement, il exige que les sociétés contrôlées par ces mêmes personnes et entités à la tête d'un groupe désignent, lorsqu'elles dépassent un niveau de chiffre d'affaires qui serait défini par décret, un commissaire aux comptes. L'exposé des motifs des amendements — identiques  — adoptés par l'Assemblée nationale sur ce sujet (amendements 2230 et 2255) fait référence à un montant de 50 % du chiffre d'affaires cumulé du petit groupe dont la mère est tenue de faire contrôler ses comptes — soit 4 millions d'euros.

Le Sénat a adopté ces deux mesures mais, et c'est là qu'existe un différent parlementaire, en a ajouté une dans l'objectif de renforcer l'audit légal des comptes des groupes. Ainsi, les sociétés contrôlées par ces mêmes personnes et entités à la tête d'un groupe — c'est à dire probablement dès lors que l'ensemble dépasse deux des trois seuils suivants : 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, 4 millions d'euros de bilan et 50 salariés — seraient également tenues de désigner un Cac lorsque le total de leur bilan, de leur chiffre d'affaires ou du nombre de leurs salariés excède, au sein du groupe, une proportion (qui serait fixée par décret) du total cumulé du bilan, du montant cumulé du chiffre d'affaires ou du nombre cumulé de salariés. La commission spéciale du Sénat préconise que cette proportion soit comprise entre 10 et 25 %, c'est à dire potentiellement (pour les plus petits groupes pour lesquels la société mère devrait faire certifier ses comptes), dans l'hypothèse où la fourchette basse serait retenue, dès lors que la filiale réalise 800 000 euros de chiffre d'affaires, 400 000 euros de bilan ou emploie 5 salariés. Cette mesure sera donc discutée par l'Assemblée nationale et le Sénat en commission mixte paritaire.

Ludovic Arbelet
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Ludovic Arbelet